Blogue Axel Evigiran

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La dispersion est, dit-on, l'ennemi des choses bien faites. Et quoi ? Dans ce monde de la spécialisation extrême, de l'utilitaire et du mesurable à outrance y aurait-il quelque mal à se perdre dans les labyrinthes de l'esprit dilettante ?


A la vérité, rien n’est plus savoureux que de muser parmi les sables du farniente, sans autre esprit que la propension au butinage, la légèreté sans objet prédéterminé.

Broutilles essentielles. Ratages propices aux heures languides...


13 janv. 2016

Des nobles motifs (Mandeville, les abeilles, Montaigne et Nietzsche)

Billet initial du 22 février 2012
(Billet initial supprimé de la plateforme overblog, infestée désormais de publicité)
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Fable des abeilles
Certains de nos brillants esprits – parmi eux nombre de nos meilleurs moralistes -, ont cru pouvoir déceler, en toute circonstance, derrière les attitudes ou les actions les plus nobles, d’inavouables mobiles.
Si, parfois, ils ont vu juste, et que l’acuité désabusée des ‘camarades la Franchise’ a pu permettre de détricoter le manteau de notoires impostures, systématiser le propos en peignant tout de noir – et ériger le retors en norme – me semble relever de la posture de pur principe.

Ce pourquoi il me plait à entendre Montaigne les titiller aux entournures :

« Je vois la plupart des esprits de mon temps faire les ingénieux à obscurcir la gloire des belles et généreuses actions anciennes, leur donnant quelque interprétation vile, et leur controuvant des occasions et des causes vaines : Grande subtilité : Qu’on me donne l’action la plus excellente et pure, je m’en vais y fournir vraisemblablement cinquante vicieuses intentions. (…) Ils ne font pas tant malicieusement, que lourdement et grossièrement, les ingénieux, à tout leur médisance ».  
(Essais, Livre I, XXXVI – Du jeune Caton)

Nietzsche ne dit pas autre chose dans ce passage du Gai savoir :

« Tous les sentiers nobles, généreux paraissent aux natures vulgaires dénués  de but, et
Le masque de l'hypocrisie
avant tout, de ce fait impossible à admettre (…) ils clignent de l’œil et semblent vouloir dire ‘Il doit bien y avoir, là dedans un bon avantage, d’une manière ou d’une autre, il y a quelque chose qui n’est pas clair’ : - ils sont soupçonneux à l’égard du noble comme s’il cherchait son profit en suivant des voies détournées. (…) La nature vulgaire se caractérise par le fait qu’elle conserve invariablement l’œil rivé sur son avantage (…). L’homme vulgaire (…) ne comprend pas comment on peut par exemple mettre en jeu sa santé et honneur pour l’amour d’une passion de la connaissance
 » 
(Gai savoir, N°3)

Dits et contredits tissent la trame complexe de nos motifs
Bien malin qui pour en démêler l’écheveau.

Ainsi ne soyons ni dupes ni médisants.
Pour reprendre enfin une belle sentence de Stendhal, que je restitue de mémoire, il est toujours bon d’avoir à l’esprit que : « Ce qui distingue l’hypocrisie la plus profonde de la vertu, ce sont ses fruits pourris ».

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J'ajoute à ce billet de 2012, un lien vers un article passionnant de Michel Terestchenko, auteur d'un essai intitulé "L'ère des ténèbres". Il s'agit d'une synthèse de sa conversation avec Matthieu Ricard, et de son "Plaidoyer pour l'altruisme".

Dans la causerie ayant suivi la conférence proprement dite, Michel Terestchenko explique : 
"je suis revenu sur les origines du paradigme qui oppose frontalement égoïsme et altruiste, en essayant de montrer comment s'est constituée cette matrice qui fait peser sur la bienveillance désintéressée soit le poids du soupçon soit la contrainte excessive du sacrifice"

                          Article de Michel Terestchenko
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Commentaires sur le billet initial de 2012


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